Lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM)
Un des risques associés aux implants mammaires est celui de développer un lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM, en anglais BIA-ACLC). Cependant, le LAGC-AIM n'est pas le seul risque lié à la chirurgie d'implantation mammaire. Les patientes et les chirurgiens doivent avoir une discussion approfondie et ouverte sur les différentes options. Les risques et avantages associés de chaque option doivent être abordés avant de décider de l'intervention.
Contexte
Qu'est-ce que le lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM) ?
En 2016, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a reconnu le LAGC-AIM comme une entité provisoire des lymphomes à cellules T, le définissant comme une forme rare de lymphome non Hodgkinien d'origine à cellules T qui peut se développer après la pose d'un implant.
Quels sont les symptômes du lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM) ?
Lorsque des implants mammaires sont placés dans le corps, ils sont insérés derrière le tissu mammaire ou sous le muscle pectoral. Avec le temps, une cicatrice fibreuse appelée capsule se développe autour de l'implant, le séparant du tissu environnant. Dans la plupart des cas de LAGC-AIM, les cellules aberrantes se trouvent dans la capsule (à côté de l'implant lui-même et / ou dans le liquide entourant l'implant, appelé « sérome ») et / ou contenues dans la capsule fibreuse de la cicatrice (voir le graphique ci-dessous). Dans certains cas, les cellules aberrantes ont migré, par exemple vers les ganglions lymphatiques adjacents.
Localisation du LAGC-AIM. Adapté du site web de la FDA [Modified from Thompson et al, 2010].
Comment diagnostique-t-on le lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM) ?
Selon les critères de la classification de l'OMS, le diagnostic est établi par la découverte de cellules anormales également observées dans d'autres formes de lymphome anaplasique à grandes cellules (ALCL). Ces cellules se trouvent dans le liquide d'épanchement aspiré et / ou sur l'échantillon de biopsie du nodule ou de la capsule et sont accompagnée d'une surexpression forte et uniforme de CD30 ou d'une expansion clonale des cellules T. On observe également une expression incomplète des biomarqueurs des cellules pan-T et une coloration négative de la kinase du lymphome anaplasique (ALK) (c’est l’ALCL négative pour l'ALK).
En ce qui concerne les facteurs de risque, les données recueillies jusqu'à présent montrent que le LAGC-AIM est surtout signalé chez les patientes ayant des implants mammaires à surface texturée. L'implication d'implants mammaires à surface lisse ne peut toutefois pas être exclue à ce stade pour les raisons suivantes.
- Un grand nombre de rapports ne contiennent pas de données sur les détails des implants, comme leur texture.
- Le LAGC-AIM est une maladie d'apparition tardive, ce qui signifie que dans la plupart des cas, elle se développe plusieurs (8 à 10) années après l'implantation. Comme la révision des implants mammaires en raison de complications est courante, un nombre important de patientes ont été exposées à plusieurs types d'implants mammaires.
- Aucun essai clinique contrôlé n'a été mené pour comparer des échantillons homogènes de patientes implantées avec des implants lisses ou texturés.
Le LAGC-AIM a été diagnostiqué chez des patientes portant des implants mammaires de différentes marques et fabricants. L'un des fabricants d'implants mammaires à surface texturée, Allergan, a décidé, en décembre 2018, de rappeler ses implants mammaires à surface texturée (Microcell et Biocell) sur le marché de l'Union européenne, parmi laquelle la Belgique, suite à la suspension de son certificat CE. En juillet 2019, le même fabricant a procédé au rappel mondial de ses implants mammaires à surface texturée et des expanseurs tissulaires Biocell, car des données obtenues après ce premier retrait ont suggéré qu'un risque accru de LAGC-AIM était plausible avec les implants Biocell d'Allergan.
Les données actuelles montrent que le remplissage de l'implant (solution saline ou silicone) et sa forme (ronde ou anatomique) ne semblent pas être des facteurs de risque de LAGC-AIM. En outre, le LAGC-AIM a été signalé chez des patientes qui ont eu une chirurgie implantaire aussi bien pour des raisons esthétiques que dans le cadre d'une reconstruction mammaire. Ces conclusions n'ont toutefois pas été évaluées dans le cadre d'une vaste étude épidémiologique bien conçue.
Comment traite-t-on le lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM) ?
Dans la plupart des cas où le LAGC-AIM est confiné au capsule (tissu cicatriciel) autour de l'implant, le retrait des implants et de la capsule complète (souvent appelée capsulectomie complète) suffit pour traiter le lymphome.
Si le LAGC-AIM s'est propagé à d'autres zones du corps, un traitement supplémentaire sera souvent nécessaire (généralement une chimiothérapie).
Il est largement admis que les avantages du retrait prophylactique ne l'emportent pas sur les risques. Le risque de développer le LAGC-AIM est faible et, lorsqu'il est diagnostiqué à un stade précoce, le pronostic est relativement bon. Compte tenu du fait que la chirurgie de révision pour le retrait préventif des implants comporte des risques en soi, ce dernier n'est pas recommandé et l'accent doit plutôt être mis sur la sensibilisation et la vigilance.
Combien de cas de lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM) ont été rapportés à l'AFMPS ?
Au 28 février 2022, un total de dix-sept cas de LAGC-AIM confirmés ont été signalés à l'AFMPS. Bien que des décès associés au LAGC-AIM aient été signalés dans le monde, pour tous les cas belges signalés, les patientes sont en rémission clinique (les tests, les examens physiques et les scanners montrent que tous les signes du cancer ont disparu). L'AFMPS n'a reçu aucune notification signalant qu’une patiente soit décédée suite au diagnostic de LAGC-AIM.
Il est difficile de déterminer le nombre total de cas ou d'estimer les risques sur la base du système de déclaration des incidents en raison d'un éventuel sous-signalement des événements et du manque de données sur le nombre exact d’implantations. Il ne faut donc pas tirer de conclusions sur la seule base de ces données. Vous trouverez ci-dessous un résumé des cas signalés à l'AFMPS.
Âge du patient au moment du diagnostic (années) |
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Stade TNM
La détermination de la stadification clinique et pathologique du LAGC-AIM est essentielle pour les stratégies de traitement. |
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Sur ce graphique : un système de stadification du LAGC-AIM, des ganglions lymphatiques et des métastases (TNM) basé sur le système de stadification TNM des tumeurs solides de l'American Joint Committee on Cancer (AJCC). Adapté de l'illustration originale de Dave Arten, MA, CMI, dans Clemens et al.
Temps écoulé entre la dernière implantation et le diagnostic (années) : |
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Surface de l'implant du dernier implant au moment du diagnostic (N) : |
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À l'exception de la sous-catégorie des implants mammaires revêtus de polyuréthane, aucune autre distinction n'a été faite entre les différentes textures (micro-/macro-texture) car, jusqu'à présent, il n'existe pas de classification normalisée basée sur la texture. On estime que 90 % des implants mammaires utilisés en Belgique ont une texture quelconque (micro-, macrotexture ou revêtement de polyuréthane). Seuls 10 % environ des implants mammaires utilisés en Belgique sont des implants à surface lisse.
Remplissage du dernier implant au moment du diagnostic (N) : |
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Implants précédents (N) : |
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Dans six cas, il s'agissait d'implants antérieurs. Dans un cas, il s’agissait des implants texturés remplis de silicone, dans un autre cas il s'agissait d'implants remplis de solution saline sans information sur la surface de l'implant. Pour les trois autres cas, aucune donnée sur l'historique des implants n'a été fournie (on ignore si les implants précédents étaient texturés - lisses, remplis de solution saline - silicone). |
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Raison de la pose de l'implant : |
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- les incidents rapportés à l'agence par les fabricants, les distributeurs, les professionnels de la santé ainsi que les patientes ;
- le suivi de la littérature médicale et scientifique ;
- l'échange d'informations entre d'autres régulateurs européens et internationaux ainsi qu'avec des experts scientifiques ;
- la collaboration avec les cliniciens et les associations scientifiques ;
- la documentation fournie par les fabricants.
Quand des problèmes de sécurité liés aux dispositifs médicaux sont détectés grâce à la collecte de données, l'AFMPS détermine si des actions correctives de sécurité sur le terrain (Field Safety Corrective Action, FSCA) sont nécessaires et appropriées. Plusieurs actions correctives doivent être considérées comme des FSCA, par exemple la dispense d'informations de sécurité supplémentaires au public, la mise à jour des informations de sécurité dans les modes d'emploi ou le rappel des dispositifs sur le terrain.
En ce qui concerne le LAGC-AIM et comme indiqué ci-dessous, l'AFMPS collabore avec de nombreux acteurs afin d'améliorer notre compréhension de la nature et des facteurs de risque potentiels qui peuvent contribuer à cette maladie rare. Le but est de déterminer les actions nécessaires pour protéger la sécurité du patient.
La France et l'Australie ont pris des mesures restrictives supplémentaires pour plusieurs types d'implants mammaires à surface texturée. Les résultats publiés le 17 mai 2019 par le Rijksinstituut voor Volksgezondheid en Milieu (Institut national de la santé publique et de l'environnement néerlandais, RIVM) ont conclu qu'il n'y a pas suffisamment de données pour prouver que d'autres types d'implants mammaires présentent un risque similaire à celui des implants Biocell. L'étude internationale sur les différents aspects du LAGC-AIM (par exemple la cause, le diagnostic, le traitement ...) est encore en cours. Comme pour toute autre question, l'AFMPS adopte une approche fondée sur des données probantes.
- Jusqu'à début 2015, pas un seul cas de LAGC-AIM n'avait été enregistré par l'AFMPS. La connaissance de la maladie étant encore limitée et l'obligation de déclaration par les professionnels de la santé peu connue, nous avons collaboré avec le Registre belge du cancer pour identifier rétrospectivement les cas potentiels.
- En août 2015, l'AFMPS a envoyé des informations à tous les points de contact de matériovigilance des hôpitaux belges afin de les avertir du risque potentiel de LAGC-AIM chez les patientes porteuses d'implants mammaires et de souligner que chaque cas diagnostiqué devait être signalé à l'AFMPS.
- Le 19 novembre 2018, l'AFMPS a participé à l'atelier d'un groupe d'experts internationaux composé d'autorités, de représentants de fabricants et de représentants de sociétés médicales scientifiques.
- En collaboration avec le Conseil Supérieur de la Santé, l'AFMPS a rédigé un rapport consultatif sur le LAGC-AIM qui a été publié en janvier 2019. Ce rapport consultatif contient des informations détaillées sur notre compréhension actuelle de la maladie ainsi que des recommandations sur le diagnostic et le traitement appropriés. Il souligne également l'importance de signaler tous les cas à l'AFMPS.
- Fin 2015, l'AFMPS a rejoint un groupe de travail européenne et internationale chargée du suivi du LAGC-AIM afin d'avoir une vision plus large de la problématique en Europe et dans le monde. Ce groupe de travail continue de se réunir régulièrement et elle a participé à plusieurs réunions européennes et internationales telles que la réunion publique des 7 et 8 février 2019 en France, la réunion publique du panel d'experts à la FDA les 25 et 26 mars 2019 et la réunion internationale sur les implants mammaires qui s'est tenue à Amsterdam le 4 juillet 2019.
- L'AFMPS continuera à surveiller activement tous les cas de LAGC-AIM signalés et à assurer le suivi des fabricants d'implants mammaires. En cas d'identification de nouveaux risques pour la santé, l'AFMPS prendra des mesures appropriées et opportunes.
- L'AFMPS continuera à sensibiliser le public et les professionnels de la santé au LAGC-AIM et à fournir des informations actualisées sur le LAGC-AIM via cette page web.
- L'AFMPS travaille en étroite collaboration avec les acteurs cliniques, notamment la Société royale belge de chirurgie plastique (RBSPS). La société publie également fréquemment des mises à jour sur le LAGC-AIM lorsque des informations pertinentes sont mises en lumière.
- L'AFMPS et le Registre belge du cancer soutiennent une étude de cohorte nationale dirigée par le Prof. Dr. Marc André (hématologue). Cette étude de cohorte rétrospective et prospective vise à étudier l'incidence et la prévalence de ce lymphome dans la population belge et est menée en étroite collaboration avec la Société Belge d'Hématologie et le registre français LAGC-AIM de la The Lymphoma Study Association.
- L'AFMPS encourage les patients et les professionnels de la santé à signaler tous les incidents liés à l'utilisation de ces produits de santé.
Recommandations pour les patientes
- Risques liés à la fois à l'intervention et / ou aux implants mammaires :
- risques liés à l'anesthésie et aux éventuelles complications péri-opératoires ;
- temps nécessaire pour se remettre de l'intervention et des complications postopératoires immédiates telles que gonflement, ecchymoses, douleur, saignement, infection ;
- complications locales les plus courantes et les résultats indésirables sont la contracture capsulaire, la rupture ou le dégonflement, les plis, l'asymétrie, les cicatrices, la douleur, l'infection au niveau de l'incision ;
- risque de lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM). Le LAGC-AIM est un cancer du sang qui se développe au niveau des cellules du système immunitaire, ce n'est pas un cancer du tissu mammaire ;
- lors du retrait de l'implant et sans chirurgie de remplacement, des modifications de vos seins naturels peuvent être observées, notamment des capitons, des plis, des rides, une perte de tissu mammaire ou d'autres changements esthétiques indésirables ;
- « maladie des implants mammaires ». Certaines patientes attribuent à leurs implants mammaires les symptômes systémiques qu'elles ressentent (comme la fatigue, des douleurs articulaires et musculaires, des troubles cognitifs, de l’anxiété, …). Bien qu'il n'existe actuellement aucune preuve scientifique démontrant que les implants mammaires sont à l'origine de ces symptômes, certaines femmes ont constaté une amélioration après avoir fait retirer leurs implants mammaires.
- Avantages et inconvénients des différents types d'implants mammaires et raison pour laquelle le chirurgien recommande un type d'implant particulier :
- les implants texturés ont été développés dans le double but de stabiliser l'implant dans la poche mammaire et de réduire le taux de contracture capsulaire. Pour cette raison, les implants texturés sont préférés aux implants à surface lisse dans la plupart des pays européens.
- le LAGC-AIM est principalement diagnostiqué chez les patientes ayant des implants mammaires à surface texturée. Il n'existe cependant aucune preuve scientifique d'une relation de cause à effet directe entre les implants texturés et le LAGC-AIM. La manière dont le LAGC-AIM se développe n’est pas encore connue.
- La possibilité de dépister le cancer du sein après la pose d'implants mammaires. Il est largement reconnu que les implants mammaires compliquent la mammographie ainsi que l'interprétation des films mammographiques. Les études cliniques n'ont cependant pas encore observé de différences de stades de diagnostic ou de taux de survie entre les femmes avec et sans implants, en raison des limites du dépistage mammographique chez les femmes ayant subi une augmentation mammaire.
- Coût de la chirurgie et des visites de suivi.
C'est un facteur important si vous êtes intéressé par la chirurgie esthétique. Discutez également des coûts liés à la nécessité éventuelle d'une intervention chirurgicale supplémentaire (comme le retrait ou le remplacement d'un implant à cause des complications ou autre), y compris les droits de garantie des implants. Les implants mammaires ne sont pas des dispositifs à vie : plus vous les gardez longtemps, plus vous aurez de chances de devoir les faire enlever en raison de complications ou d'effets indésirables. - L'expérience du chirurgien
Après avoir consulté votre chirurgien, prenez votre temps avant de prendre une décision. Pour une opération de chirurgie esthétique, la loi du 23 mai 2013 impose un délai d'au moins quinze jours entre la première consultation et l'intervention. Au cours de cette première consultation, les détails de l'intervention, y compris les risques et les options, doivent être discutés.
Si vous décidez finalement de vous faire opérer, vous et votre chirurgien devez signer un document de consentement éclairé. Autorisez aussi le chirurgien à envoyer une lettre avec les détails de l'intervention à votre médecin de famille ou à vos autres prestataire de soins de santé. De cette façon, il(s) saura (sauront) que d'éventuels futurs changements dans votre état de santé pourraient être liés à l'intervention.
- Demandez une carte d'implant. Cette carte contient des informations sur votre implant, telles que le nom du produit, le numéro de catalogue et le numéro de lot. Si il y avait un avis concernant le produit ou un rappel de produit, cette carte vous indiquera si vos implants sont concernés. Si vous ne vous souvenez plus du type d'implant que vous avez reçu ou que vous avez perdu votre carte d'implant, votre chirurgien pourra vous aider.
- Prenez rendez-vous avec votre chirurgien pour un suivi périodique et suivez les instructions de votre médecin sur la façon de surveiller vos implants mammaires.
- Restez vigilante à tout changement au niveau de la poitrine et procédez régulièrement à l'auto-examen de vos seins. Les symptômes du LAGC-AIM sont :
- un nodule à proximité de l'implant ou dans le tissu qui s'est développé autour de l'implant mammaire ;
- une abrupte augmentation de la taille du sein touché. Il est dû à l'accumulation de liquide autour d'un ou des deux implants mammaires qui se produit parfois plusieurs années après l'intervention. Il est important de noter que du liquide peut s'accumuler autour de votre implant mammaire pour d'autres raisons qu'un LAGC-AIM, pendant le processus de guérison après l'intervention.
Si vous ne présentez pas de symptômes, il n'est pas nécessaire de modifier vos soins médicaux habituels et votre suivi. Comme le LAGC-AIM est rare, les experts ne recommandent pas le retrait des implants chez les personnes saines ne présentant pas de symptômes.
- Si vous remarquez des changements lors des auto-examens réguliers de vos seins ou si vous avez d'autres préoccupations concernant votre implant mammaire, prenez rendez-vous avec votre chirurgien ou votre médecin généraliste.
Recommandations pour les professionnels de la santé
Les patientes qui envisagent de recourir à des implants mammaires pour des raisons esthétiques ou reconstructrices doivent être informées des risques liés à l'intervention chirurgicale et des risques spécifiques à l'implant. Dans cette perspective, il est important de rappeler à vos patientes que les implants mammaires ne sont pas des dispositifs à vie et que plus longtemps l'implant sera en place, plus les patientes auront de risques de devoir subir une chirurgie de révision.
Le risque de LAGC-AIM doit être traité dans le cadre d'un processus décisionnel éclairé. L'AFMPS suggère de donner aux patientes, au moins les informations suivantes sur le LAGC-AIM.
- Le LAGC-AIM, bien que rare, est un risque lié aux implants mammaires. Les données actuellement disponibles ne permettent pas de donner une estimation chiffrée de ce risque. Cependant, les experts estiment actuellement que le risque se situe entre 1 sur 1000 et 1 sur 10 000. Pour illustrer ce point, le chirurgien peut, s’il le souhaite, replacer ce risque dans son contexte et informer la patiente que ce risque est faible par rapport au risque de développer tout autre type de cancer invasif tels que le cancer du sein (1 sur 8), le cancer du poumon et le cancer des bronches (1 sur 17), le cancer du côlon et le cancer du rectum (1 sur 25). Bien entendu, il est impératif que la patiente comprenne que le LAGC-AIM est un risque supplémentaire auquel les femmes sans implants mammaires ne sont pas exposées.
- Le LAGC-AIM est une maladie d'apparition tardive. Les symptômes se manifestent sur 1 an et en moyenne 8 à 10 ans après la pose de l'implant. Les patientes doivent rester vigilantes aux symptômes potentiels.
- Sur la base des données actuellement disponibles, le LAGC-AIM semble se produire principalement chez les patientes ayant des implants mammaires à surface texturée. Le développement de la maladie avec des implants lisses ne peut toutefois pas être exclu à ce stade. À ce jour, il n'existe aucune preuve scientifique d'un lien de causalité direct entre les implants (texturés) et le LAGC-AIM et l'étiologie de la maladie reste à déterminer.
Outre le LAGC-AIM, les discussions devraient également porter sur les raisons les plus fréquentes du retrait de l'implant, telles que la contracture capsulaire (durcissement des tissus autour de l'implant), le déplacement de l'implant ou la rupture / dégonflement de l'implant. Il est conseillé d'aborder également le risque de ruptures silencieuses et les discussions scientifiques actuelles sur les « maladies liées aux implants mammaires ».
Fournir aux patientes du matériel éducatif (étiquette du fabricant, brochure d'information pour les patientes et tout autre matériel d'étude pertinent) afin de s'assurer qu'elles sont en mesure de donner un consentement pleinement informé et éclairé.
Une hypothèse est que la stimulation des cellules T due à une infection chronique par un biofilm bactérien pourrait augmenter le risque de développement du LAGC-AIM. Pour cette raison, la pose d'un implant demande de respecter les précautions de soins standard :
- prophylaxie antibiotique,
- irrigation de la poche,
- stérilité,
- préparation de la peau.
Ces précautions auraient également l'avantage supplémentaire de réduire le risque de contracture capsulaire. Un groupe de chercheurs australiens a publié un plan d'action en quatorze points sur ce sujet.
Remettez aux patientes une carte d'implant spécifique à chaque patiente afin que les informations sur les implants posés soient facilement accessibles à tout moment. Conservez une copie de la carte d'implant dans vos dossiers.
Encouragez les femmes porteuses d'implants à vérifier régulièrement la présence de symptômes tels que des nodules, des gonflements ou des déformations en procédant à un auto-examen régulier des seins et en prévoyant des rendez-vous de suivi réguliers. Il faut également informer les patientes sur la nécessité de demander un avis médical immédiat en cas de changement de taille, de forme ou d'apparition de symptômes liés au sein et / ou à l'implant.
Les patientes peuvent également présenter une contracture capsulaire, des modifications de la peau et une lymphadénopathie régionale. Les signes physiques du LAGC-AIM peuvent être similaires à ceux d'une infection courante (douleur, rougeur, sensibilité et gonflement).
Un diagnostic correct et rapide du LAGC-AIM revêt une importance cruciale en termes de pronostic de la maladie. Les décès confirmés attribués au LAGC-AIM ont été dus, soit à un retrait incomplet de la capsule, soit à la propagation de la maladie avant l'instauration du traitement (cancer métastatique). Dans la majorité de ces cas, les patientes ont succombé à la progression de la maladie dans la paroi thoracique et au niveau du médiastin.
Effectuer une aspiration à l'aiguille fine (et / ou microbiopsie) d'un épanchement (masse) et envoyer l'aspirat (tissu) pour une cytologie (histologie) et une cytométrie de flux et / ou des études moléculaires pour la confirmation du diagnostic de LAGC-AIM.
L'évaluation diagnostique du LAGC-AIM (lymphome anaplasique à kinase (ALK) négatif, lymphome à cellules T CD30 positif) nécessite un examen cytologique spécifique qui consiste à aspirer du liquide sérologique et des échantillons représentatifs de la capsule. Le bilan cytologique comprend l'évaluation du liquide du sérome ou de la masse avec des frottis et une immunohistochimie par bloc cellulaire / cytométrie de flux pour les marqueurs de différenciation (CD30) et de kinase du lymphome anaplasique (ALK). Sans ces tests spécifiques, on peut passer à côté du diagnostic du LAGC-AIM. Le test CD30 est essentiel pour les guider les pathologistes et des efforts doivent être faits pour établir un diagnostic avant toute intervention chirurgicale. Bien que l'expression du CD30 soit un indicateur du LAGC-AIM, la coloration « rare » ou « faible » du CD30 (<2 % des cellules) est exprimée normalement et ne doit pas être considérée comme indiquant la présence d'un LAGC-AIM. Dans cette perspective, l'expression du CD30 seule n'indique pas un LAGC-AIM et la morphologie de la cellule (grandes cellules anaplastiques atypiques) est tout aussi importante.
Lorsque vous choisissez une approche de traitement, tenez compte des directives de pratique clinique actuelles. Pour la plupart des femmes, le retrait des implants et la capsulectomie oncologique, qui comprend la résection complète de toute masse associée à la capsule, est curative. Si la maladie s'est disséminée, des traitements supplémentaires, y compris la chimio- et / ou radiothérapie, doivent être envisagés après une consultation oncologique multidisciplinaire (COM/MOC).
Selon les dernières données, il est fortement conseillé de retirer également les implants mammaires controlatéraux par capsulectomie complète. Par ailleurs, plusieurs cas bilatéraux ont été détectés.
Auprès de l'AFMPS
Signalez tous les cas suspects et confirmés de LAGC-AIM en utilisant le formulaire de notification des cas suspects ou confirmés de LAGC-AIM.
Si un cas suspect a été rapporté, actualisez le rapport une fois que les résultats des tests sont disponibles en indiquant si le diagnostic a été confirmé ou rejeté. Dans certains cas, l'AFMPS peut vous contacter pour des informations complémentaires.
Veuillez noter que le remplissage du formulaire de cas n'est pas réservé aux seuls chirurgiens plastiques. Il peut être effectué par tout professionnel de la santé chargé de traiter la patiente (médecin généraliste, chirurgien (plastique), pathologiste, radiologue, hématologues, gynécologue, oncologue …).
L'identité des déclarants et des patientes est toujours confidentielle.
Auprès du Registre belge du cancer (BCR)
Les hôpitaux qui disposent d'un programme de soins oncologiques et de services d'anatomie pathologique sont légalement tenus de coopérer avec le Registre belge du cancer. Les données relatives aux cas confirmés de LAGC-AIM doivent, en tant que telles, être également transférées au Registre belge du cancer, avec les codes suivants :
- code diagnostique : ALCL ALK négatif (code 9715),
- code de localisation : Sein (code C50) même s'il y a une atteinte cutanée.
Auprès du national Registry study
Cette étude de cohorte rétrospective et prospective vise à étudier l'incidence et la prévalence de ce lymphome dans la population belge. Elle est réalisée en étroite collaboration avec le registre LAGC-AIM français de The Lymphoma Study Association (LYSA).
L'objectif de cette étude une meilleure connaissance des causes et des traitements du LAGC-AIM par l'enregistrement des cas et le prélèvement d'échantillons en vue d'une analyse plus approfondie. Les médecins sont encouragés à participer.
Comme autant le BCR que l'AFMPS sont tenus à la confidentialité, aucune des organisations ne transmettra d'informations sur les cas pour inclure des données dans l'étude. Les deux organisations soutiennent toutefois l'étude et encouragent les médecins à y participer.
La notification à l'AFMPS et au BCR est une obligation légale, tandis que la collaboration à l'étude nationale est volontaire et n'est possible que si les patientes y consentent.
Informations supplémentaires et glossaire
Différentes sources peuvent être consultées pour obtenir des informations objectives sur la sécurité des implants mammaires.
Une importante littérature médicale a été publiée depuis 2011, quand la FDA a parlé pour la première fois d'un lien potentiel entre l'ALCL et les implants mammaires. Cette littérature comprend des études de cas supplémentaires et des examens complets de l'histoire naturelle et des résultats à long terme de la maladie. Plusieurs articles de journaux récents explorent les facteurs de risque potentiels de développement du LAGC-AIM, y compris les méthodes utilisées pour créer la surface texturée et le rôle du biofilm.
Vous trouverez de plus amples informations dans l'avis final du SCHEER (Scientific Committee on Health, Environmental and Emerging Risks), chargé par la Commission européenne de donner son avis sur cette question.
Vous trouverez également de plus amples informations sur le site web de la Société royale belge de chirurgie plastique (RBSPS).
Plusieurs autres instances réglementaires ont également publié des informations sur la sécurité des implants mammaires. Ces autorités compétentes sont (liste non exhaustive): l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (France), l'Inspectie, Gezondheidszorg en Jeugd (Pays-Bas), le Bundesinstitut für Arzneimittel und Medizinprodukte (Allemagne), la Medicines and Healthcare products Regulatory Agency (R-U), la Food and Drug Administration (E-U), Health Canada (Canada) et Therapeutic Goods Administration (Australie).
Effet indésirable |
Un événement non attendu et non souhaité.
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ALCL |
Un type de lymphome non Hodgkinien qui se développe à partir de globules blancs appelés cellules T. Au microscope, les cellules cancéreuses de l'ALCL paraissent grandes, peu développées et très anormales (« anaplasiques »). Le LAGC-AIM est l'un des quatre principaux types d'ALCL.
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Biofilm |
Communauté de micro-organismes irréversiblement attachés à une surface (dans ce cas, la surface d'un implant mammaire) et enfermés dans une substance polymère extracellulaire (= polymères naturels sécrétés par les micro-organismes pour établir l'intégrité fonctionnelle et structurelle des biofilms). Le biofilm confère aux micro-organismes une résistance accrue aux réponses cellulaires et chimiques de l'hôte (le corps humain).
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Capsule |
La formation d'une capsule (tissu cicatriciel) est une réponse inflammatoire complexe à la présence d'un dispositif biomédical (par exemple, tout type d'implant) et fait partie intégrante du processus de guérison.
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Contracture capsulaire |
Complication de la chirurgie d'implantation mammaire caractérisée par un resserrement / durcissement de la capsule autour de l'implant, qui peut entraîner une douleur, une fermeté non naturelle et une distorsion du sein. La gravité de la contracture capsulaire est évaluée à l'aide d'un système de notation (grade I - IV de Baker). La contracture capsulaire est l'une des raisons les plus fréquentes de la chirurgie de révision et elle ne constitue pas, en soi, un symptôme très spécifique du LAGC-AIM.
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Capsulectomie |
Retrait chirurgical de la capsule.
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CD30 |
Une protéine de la membrane cellulaire et un marqueur tumoral.
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Rémission clinique |
Réduction ou disparition des signes et symptômes de la maladie.
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Déflation |
Terme utilisé pour indiquer la rupture des implants mammaires remplis de solution saline.
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Carte d'implant |
Dès la mise en œuvre de la nouvelle législation sur les dispositifs médicaux (Medical Device Regulation - MDR), la délivrance de la carte d'implant au patient deviendra obligatoire dans toute l'Europe. En Belgique, l'arrêté royal relatif au Registre central de traçabilité publié le 02.10.2020 détermine que la pose d'implants mammaires doit être enregistrée dans le Registre central de traçabilité à partir du 1er mai 2020. Ce registre génère également une carte d'implant qui peut être remise au patient. De plus, le registre est accessible aux patientes pour qu'elles puissent facilement récupérer les informations sur les implants qui leur ont été posés.
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Nodule |
Une masse de tissu de taille et de forme indéterminées.
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Métastases |
Le développement de tumeurs malignes secondaires à distance du site primaire du cancer.
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Révision |
Chirurgie secondaire destinée à remplacer un implant mammaire défectueux ou à corriger un résultat indésirable.
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Sérome |
Accumulation de liquide clair (sérum) dans l'organisme entraînant un gonflement local. Le gonflement temporaire postopératoire est un phénomène normal. Dans les cas du LAGC-AIM, le gonflement persistant se produit généralement plus d'un an après l'intervention d'implantation.
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Cellule T |
Un type de lymphocyte qui joue un rôle central dans la réponse immunitaire.
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TNM |
Tumor extent, lymph Node involvement and Metastasis (Étendue de la tumeur, implication des ganglions lymphatiques et métastases). Il s'agit d'un système utilisé pour stadifier la tumeur.
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Échographie |
Technique d'imagerie diagnostique |